Semaine du 31 janvier 2000 |
Après ce dernier samedi, ma semaine m'a parue fade! Pourquoi aller travailler quand il y a des plages blondes, le chaud soleil, des forêts tropicales à découvrir, des petites rivières chantantes, des cascades, des grottes (oui, des grottes, pas des caves, comme papa m'a fait remarquer... "cave", c'est le mot anglais.)
Les astronomes avons aidé la libraire à mettre à jour une base de données en vérifiant si des articles publiés et soit disant basés sur des données provenant du CFHT contiennent effectivement des données (et assez de données) pour pouvoir arborer l'étiquette "CFHT". Une ou deux heures de lecture (en traviole, pas en détails), petite réunion où la libraire nous avait attiré avec deux bouteilles de vin (mais c'est qu'elle nous connait bien!).
Préparation d'un petit article sur les dernières nouvelles de CAFE, à paraître dans le Bulletin de CFHT. Il faut tenir nos "clients" (les astronomes qui viennent observer) informés des derniers développements instrumentaux.
C'est le temps de renouveler mon bail de 6 mois! Même paperasse, même conditions, même paiement mensuel.
Je me suis creusée les méninges pour trouver un projet d'observation
que je pourrais mener avec Gecko, le spectrographe dont je suis
responsable. Ça serait bien que je l'utilise moi-même pour bien saisir
son fonctionnement et avoir une meilleure intuition de ce qui est normal
ou anormal quand on observe. Pour ce faire, j'ai commencé par une petite
recherche dans la littérature pour vérifier si ce que je cherchais
n'avait pas déjà été fait; réponse "non", alors on
continue. Vérification que l'objet que je veux observer est visible dans
le ciel pour le prochain semestre (août 2000 - janvier 2001); réponse
"oui" mais pas tout le temps, alors il faut faire attention aux dates
demandées. Vérification de la faisabilité technique, de la précision
requise, des temps d'intégration, de la configuration instrumentale
nécessaire, etc. Ça colle. Comme je manque un peu d'expérience en
spectroscopie, je me suis ensuite mise à la recherche de collaborateurs,
en utilisant mon réseau de contacts actuels (profs de l'Université de
Montréal, chercheurs post-doctoraux, astronomes avec lesquels j'ai déjà
collaboré pour d'autres projets); bonne récolte de 2 astronomes, dont un
qui sera de passage fin février ici, et avec qui je pourrai alors
discuter plus en détails du projet! Reste à écrire la demande de temps
et à convaincre le comité d'allocation du temps de télescope que mon
projet mérite d'obtenir quelques nuits.
Il fait beau (incroyable!), alors je suis montée pour observer un peu avec OASIS, l'instrument qui, d'habitude, attire les nuages comme un aimant.
Très belle journée, mais sur la Saddle Road, j'ai vu les effets du "vog" dont j'avais entendu parler, mais que je ne n'avais pas vraiment noté jusqu'à ce jour. Le vog, c'est une brume ("fog") causée par la lave en fusion qui entre en contact avec l'eau de mer, dégage des gaz irritants et revient sur l'île sous forme de brume. Entre le Mauna Kea et le Mauna Loa, un genre de fumée blanchâtre masquait le paysage, me rappelant les nuages d'humidité qui planent au-dessus de Montréal les jours torrides d'été, absorbant le paysage. Mais bien plus qu'une nuisance visuelle, le vog cause plusieurs problèmes de santé, de l'irritation passagère des yeux et voies respiratoires, jusqu'à des crises d'asthme, en passant par des symptômes ressemblant à ceux d'un rhume et des maux de tête. La semaine dernière, on avait même recommandé aux parents de Hilo de garder leurs enfants à l'intérieur. Au sommet, pas de trace du vog, heureusement, à part une odeur de souffre...
J'ai pris des notes, j'ai appris, pis je me suis endormie... Encore une fois, au début, j'étais stimulée par la nouveauté, le désir d'apprendre, le défi me faire travailler mes neurones à 4200 mètres. Mais après quelques poses scientifiques, mon intérêt s'est légèrement émoussé, peut-être agacé par le petit mal de tête qui est apparu sournoisement. J'ai eu beau essayer de grignoter croustilles, chocolat, et noix, et bu 3 bouteilles de Gatorade, tout aussi fluorescentes les une que les autres, pour essayer de chasser la fatigue et le mal de tête, ma chaise est devenue très confortable, et je me suis endormie. Eh bé quoi, c'est ce qui m'arrive quand ma présence n'est pas absolument essentielle...
Aux alentours de minuit, je suis redescendue avec une astronome
(l'autre astronome du sexe rare du CFHT), en laissant l'observateur
s'amuser avec son projet scientifique.